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Quelle utilisation des évaluations standardisées en mathématiques ? Un exemple : Projet pour l’Acquisition de Compétences En Mathématiques (PACEM)

Dernière modification 14/04/2012 06:41

évaluation, diagnostic

Jean-François Chesné (03/01/12)
Chef du bureau de l'évaluation des actions éducatives et des expérimentations
Sous direction des évaluations et de la performance scolaire 
Direction  de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) 

Fondements et enjeux

L’expérimentation PACEM est un projet intégralement mené par le bureau de l’évaluation des actions éducatives et des expérimentations de la DEPP, de la conception et la mise en Å“uvre des évaluations des élèves et celles des formations à destination des enseignants.

Cette expérimentation s’inscrit d’une part dans un contexte de questionnement sur la réussite des élèves et sur l’évolution des pratiques enseignantes, et d’autre part dans un contexte d’accompagnement de la mise en place de nouveaux objectifs institutionnels.

En effet, un certain nombre d’évaluations nationales ou internationales antérieures conduites par la DEPP a montré des résultats convergents : parmi eux, nous citerons l’augmentation du nombre d’élèves de bas niveau et l’impact de leur environnement socio économique sur leurs réussites. Bien que diffusés par le biais de notes d’informations et de dossiers publiés par la DEPP, il est légitime de s’interroger sur leur prise en compte par les enseignants dans leurs pratiques quotidiennes. De façon générale, nous faisons l’hypothèse que, si les évaluations à large échelle (sur échantillons ou exhaustives) ont de plus en plus d’importance dans le pilotage du système éducatif français, la plupart des enseignants semblent considérer qu’elles constituent davantage un outil externe de mesure des acquis des élèves plutôt qu’un ensemble de ressources pour la classe. L’expérimentation PACEM renvoie notamment à la mise en Å“uvre des évaluations nationales de CE1 et de CM2 (et bientôt de 5e) qui posent la question, au-delà du retour chiffré de leurs résultats, de leur exploitation locale par les enseignants. Dans le même temps, les six dernières années ont vu, avec l’apparition du socle commun de connaissances et de compétences et la réécriture des programmes de l’école et du collège, des évolutions sensibles dans l’organisation des enseignements et des pratiques pédagogiques souhaitées. Il est donc important de s’interroger sur la question de la pénétration de ces nouveaux textes auprès du corps enseignant, de leur interprétation et de l’esprit dans lequel ils peuvent être mis en Å“uvre.

Présentation du dispositif

Lancée en septembre 2010, l’expérimentation se terminera en juin 2012. Sa mise en Å“uvre en 2010-2011 s’est faite dans deux académies différentes et a concerné deux niveaux de classe : le CM1 à Marseille, et la sixième, dans l’académie de Créteil. En 2011-2012, le dispositif est reconduit en CM1 et en sixième avec le même protocole et étendu aux niveaux CM2 et cinquième en suivant les élèves testés en 2010-2011, ce qui représente au total 3 000 élèves répartis dans 40 écoles à Marseille et 6 000 élèves répartis dans 19 collèges pour Créteil.

La mise en Å“uvre de PACEM sur le niveau CM1 en 2010-2011

Nous décrirons ici dans ses grandes lignes le premier volet de l’expérimentation menée en CM1 à Marseille en 2010-2011, et présenterons plus particulièrement quelques résultats obtenus par les élèves à certains items.

L’observation des résultats des élèves a été effectuée dans trois circonscriptions : toutes les écoles pour deux d’entre elles, – Marseille 11 et Marseille 12 -, sont engagées dans l’expérimentation, tandis que l’autre, celle d’Istres, constitue la circonscription témoin. Presque toutes les écoles expérimentatrices relèvent de l’éducation prioritaire.

L’organisation du dispositif est la suivante :

  • deux tests proposés aux élèves : l’un en début, l’autre en fin d’année scolaire ;

  • une formation proposée à certains enseignants;

  • l’accès à un site collaboratif pour les enseignants ;

  • un travail de mutualisation des pratiques pour les enseignants des écoles engagées dans le projet ;

  • une collaboration de la DEPP avec les IEN, les conseillers pédagogiques et le groupe de pilotage départemental mathématiques.

La population concernée par le projet

Tous les enseignants ayant une classe de CM1 ou un double niveau en 2010-2011 dans une école des circonscriptions de Marseille 11, Marseille 12 et d’Istres sont impliqués, soit 86 enseignants. Parmi ceux-ci, nous distinguons trois catégories :

  • les enseignants expérimentateurs qui ont bénéficié directement d’une formation : ce sont les « correspondants » du projet ;

  • les autres enseignants expérimentateurs, dits « associés » au projet : ce sont les enseignants des écoles engagées dans le projet qui n’ont pas participé à une formation spécifique liée au projet ;

  • les enseignants « témoins ».

Les cahiers d’évaluation

Les tests 1 et 2 ont une structure similaire, seul le nombre d’items change. Ils se décomposent en deux parties de 30 minutes de passation : la première porte sur les unités de mesures, et la seconde sur la résolution de problèmes. Dans la première partie, les élèves ont soit à répondre à des questions à choix multiples (QCM), soit à produire des réponses courtes. La deuxième partie ne comporte que des QCM. 7 items sont communs aux deux tests dans la perspective d’une comparaison temporelle. Les contenus sont des tâches correspondant aux connaissances et aux capacités indiquées dans les programmes de CE2 et de CM1. Le contenu et la passation des tests sont donc très similaires à d’autres tests nationaux passés par les élèves. Nous sommes toutefois conscients des limites de ce type d’évaluation, en particulier sur le thème des Grandeurs et des mesures, puisque les modalités d’évaluation retenues ne renvoient sans doute que partiellement aux compétences potentiellement acquises par les élèves.

La formation

L’accompagnement des enseignants pendant le projet se décline en trois composantes. La première est une formation minimale en présentiel : une demi-journée de lancement en septembre 2010 pour tous les enseignants expérimentateurs, puis 2 jours début octobre 2010 réservés aux correspondants. Au cours de l’année, les enseignants expérimentateurs ont accès une plate-forme collaborative et un suivi local est effectué dans les écoles par les IEN et les conseillers pédagogiques. Le cÅ“ur de ce dispositif, le moment de formation en présentiel, s’articule autour de 4 temps :

  • une phase de déconstruction : il s’agit d’amener les enseignants à accepter de lâcher prise sur certaines de leurs pratiques et de leurs représentations, de « faire de la place pour du nouveau » ; l’utilisation d’éléments statistiques lors de ce premier temps de formation s’avère très utile, permettant de mettre à distance et donc objectiver la difficulté d’une tâche ;

  • une phase d’apport de contenus de la part du formateur : contenus mathématiques et éléments de didactique « simples », liens avec le programme, explicitation des capacités attendues ;

  • une phase d’appropriation : des tâches alternatives à celles des fichiers et manuels utilisés sont proposées aux enseignants, qu’ils ont à mettre en situation, Ã  travers différents scénarios, potentiellement adaptables à la classe ;

  • une phase d’organisation, de structuration et de contextualisation : ce dernier temps de la formation fait écho au premier puisqu’il s’agit de proposer aux enseignants des éléments leur permettant de reconstruire des séances et à plus longue échéance, des séquences, de réviser la façon dont ils concevaient jusqu’alors leurs progressions.

Les résultats

Nous sommes conscients qu’un tel projet, par son approche pluridimensionnelle et les nombreuses variables qui interviennent, nécessite une certaine prudence dans la méthodologie à adopter et la présentation de ses résultats. Toutefois, une première analyse des taux de réponse aux sept « items d’ancrage » – sept items communs aux deux tests – et celle des scores de réussite à l’issue de la première année d’expérimentation, convergent toutes deux vers les mêmes conclusions : les résultats des élèves de Marseille 11 et de Marseille 12 ont davantage progressé entre les deux tests que ceux d’Istres, Marseille 11 étant la circonscription où les scores ont le plus augmenté. Cela tendrait à montrer qu’un investissement relativement faible mais spécifique de formation continue et d’accompagnement des enseignants pourrait conduire à une amélioration sensible des performances scolaires. Une analyse plus approfondie fondée sur les scores obtenus aux items d’ancrage permettra de comparer les niveaux de difficulté des deux tests, et donc de mieux déterminer l’impact de l’expérimentation sur l’évolution des acquis des élèves.

Quelques informations sur les acquis des élèves en début de CM1 et début de sixième

Les scores de réussite obtenus aux tests 1 ont fait l’objet d’une attention particulière puisque les items des cahiers d’évaluation des élèves ont à la fois été retenus comme étant caractéristiques des attendus (partiels) au regard des programmes de CE2 ou du cycle 3, et dans la perspective d’une utilisation en formation. Une analyse item par item a été réalisée, et communiquée aux enseignants expérimentateurs dans un document qui leur a été transmis, et déposé sur le site collaboratif. Indépendamment de PACEM, les résultats des élèves obtenus à ces items constituent en eux-mêmes des éléments d’information importants.

Des résultats en début de CM1 (septembre 2010)

Tableau 1. Connaître les relations qui les lient des unités de mesure

Tâche 

Témoins 

Expérimentateurs

5 kg = ... g 

27,3% 

9,30%

3 L = … cL 

50,4% 

30,20%

630 mm = … cm 

42,3% 

24,80%

400 centimes = … € 

68,9% 

47,30%

Ces résultats révèlent une non – maîtrise chez les élèves des unités usuelles relevant du programme de CE2, voire de CE1 pour certaines, chez les élèves témoins et de façon plus marquée chez les élèves expérimentateurs. On peut dès lors s’interroger à la fois sur le temps consacré à ces apprentissages et les pratiques les concernant ainsi que sur les difficultés qui attendent les élèves au CM1 et auCM2 pour des changements d’unités qui font intervenir des nombres décimaux.

Tableau 2. Changement d’unités de mesure des durées

Tâche 

Témoins 

Expérimentateurs

1 min 30 s = ... s 

42,0% 

23,70%

120 min = ... h 

43,4% 

31,10%

50 h = ... jours ... h 

36,0% 

21,90%

4 semaines = ... j 

62,0% 

50,20%

1 année = ... mois 

80,8% 

62,80%

D’une part, ces items sont parmi ceux qui sont les moins bien réussis par les élèves expérimentateurs par rapport aux élèves témoins, en particulier le premier et le dernier item, et d’autre part, ils sont parmi les plus discriminants pour l’ensemble du test. On peut en conclure que ce sont bien les élèves en difficulté qui échouent à ces deux items, et qu’ils sont bien plus nombreux parmi les élèves expérimentateurs. Si on lie ce constat au caractère prédictif de la maîtrise globale sur les durées relevé par des études antérieures, il est alors important de s’interroger sur les acquis d’élèves largement issus de l’éducation prioritaire.

Le dernier résultat concerne un item maintes fois utilisé pour la différenciation aire/périmètre. Compte tenu du niveau concerné, seul une question sur le périmètre était posée aux élèves.

 

 

Deux résultats remarquables sont à noter à propos de cet item : des taux de réussite très bas, aussi bien chez les élèves expérimentateurs (8,2 %) que les témoins (15,4 %), et un caractère très peu discriminant, ce qui interroge par conséquent la lisibilité des programmes et les stratégies d’enseignement sur les grandeurs, en particulier le concept de périmètre.

Des résultats en début de sixième (septembre 2010 et septembre 2011)

Les tests de septembre 2010 et 2011 reprenaient les six opérations à poser de l’évaluation nationale 2010 de CM2 : deux d’entre elles portent sur des entiers, les quatre autres font intervenir des décimaux. Les scores obtenus sur l’ensemble des élèves testés sont très voisins. La multiplication 39 × 57 et la division 544 : 17 sont réussies environ par un élève sur deux. L’addition 154,8 + 36,57 est réussie par environ trois quarts des élèves, la soustraction 138,85 – 49,2 et la multiplication 24,3 × 6 par un peu plus de la moitié d’entre eux et la division 276 : 8 (avec quotient décimal) par à peine un élève sur cinq. Cette proportion d’élèves est la même que celle qui réussit à effectuer le produit 4,28 x 3,6 (non testé en CM2 car relevant du CM2).

Parmi les autres items qui lient opérations et décimaux, citons cinq calculs que les élèves devaient effectuer rapidement sans poser les opérations et quatre multiplications ou divisions par 10, 100 ou 1 000. Là aussi, les résultats sont bas : 41,3 % pour la somme 5,2 + 13 + 2,8 et 30,5 % pour la différence 38 – 1,5 ; pour les produits, 37,6 % pour 27 × 20 ; 35,1 % pour 4,6 x 3 et 17,4 % pour 62 x 0,5.

Tableau 3. Multiplication et division par 10,100, 1 000

Tâche 

Sept 2010 

Sept 2011

7,14 x 100 

37,8 % 

36,70%

3,72 x 1 000 

30,2 % 

29,20%

16,2 : 10 

28,7 % 

31,10%

67 : 100 

28,0 % 

25,90%

Ces résultats posent clairement la question de l’acquisition des techniques opératoires sur les décimaux en fin d’école primaire, et celle du positionnement en termes de choix à effectuer actuellement par les professeurs de mathématiques en sixième.

Conclusion

L’expérience acquise et les résultats obtenus à l’issue de la première année de la mise en Å“uvre de PACEM tendent à proposer, dans le cadre de l’enseignement obligatoire des mathématiques, quelques suggestions :

  • une conception globale de l’enseignement orientée « du gros vers le petit » avec des dialectiques affirmées : conceptuel/représentations et technique, raisonnement/technique, oral/traces écrites (éventuellement intermédiaires), conscience des nombres/des grandeurs, temps de la classe pour tous/ pour chacun ;

  • une organisation structurée de l’apprentissage des faits numériques : hiérarchisation, calcul mental, liens avec les opérations posées, avec la résolution de problèmes, avec les grandeurs, avec l’algèbre ;

  • un positionnement clair du collège : explicitation du socle, hiérarchisation des objectifs ;

  • une formation continue efficace : formation de formateurs, rôle des CP maths, stratégies collectives (préparations collégiales, recours aux « PE maths » du 1er degré, maillage avec le collège).

 

 

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