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Le point de vue de l'ARDM

Dernière modification 11/11/2008 08:49

Association pour la Recherche en Didactique des Mathématiques

Nécessité de formations initiale et continue à la didactique des mathématiques pour des professeurs enseignant les mathématiques

 

Site de l'ARDM

L’Association pour la Recherche en Didactique des Mathématiques (ARDM) revendique la nécessité d’une formation initiale et continue des professeurs ayant à enseigner les mathématiques qui prenne en compte les résultats acquis depuis près de quarante ans en didactique des mathématiques. Or, le projet gouvernemental visant à recruter à l’issue d’un master 2 les enseignants du primaire et du secondaire en France, est porteur du danger de voir disparaître cette dimension dans les formations initiales.

Le présent texte vise à préciser, à partir de son propre champ d’intervention, les lignes de force que l’ARDM estime nécessaire de donner à une formation conduisant à enseigner les mathématiques. L’urgence de l’actualité pourrait tendre à réduire cette contribution aux seuls contenus de formation initiale que l’on souhaiterait voir pris en compte : licences et masters conduisant à enseigner les mathématiques en école primaire et dans l’enseignement secondaire général et professionnel (PE, PLC, PLP). Néanmoins, elle concerne tout autant les contenus de formation continue de ces catégories enseignantes, que les formations initiale et continue des enseignants du supérieur en mathématiques ; ces formations sont en effet actuellement soit déficitaires, soit inexistantes.

La didactique des mathématiques a pour objet l’étude des conditions et des moyens de diffusion des savoirs mathématiques dans la société, et en particulier dans l’institution scolaire. A ce titre elle a vocation, entre autres, à traiter du métier de professeur de mathématiques, de la maternelle à l’Université incluses, et des questions de formation à ce métier. Elle reprend à son compte des problèmes que la société ou la profession se posent, mais en les ayant au préalable mis à distance pour les transformer en objets d’études. Une quarantaine d’années de recherches lui permettent de disposer d’un corps de savoirs permettant de poser de manière scientifique les questions relatives à l’enseignement des mathématiques et d’y apporter des éléments de réponses sur des bases rigoureuses. Un tel corpus théorique et méthodologique permet de comprendre en quoi les problèmes auxquels l’enseignant de mathématiques est confronté relèvent d’une dimension collective, solidaire car professionnelle, tenant d’une part aux mathématiques elles-mêmes et à leur épistémologie, d’autre part aux conditions et contraintes sous lesquelles se déroule le processus d’enseignement des mathématiques. Il ne s’agit donc pas seulement de rechercher leur hypothétique solution dans une didactique individuelle, qui tiendrait par exemple d’un « charisme » plus ou moins bien distribué selon les différences inter-personnelles. C’est une des raisons pour lesquelles la formation aux métiers de l’enseignement des mathématiques, dans leur diversité, se doit d’inclure une indispensable formation à la didactique.

Cette formation commence par une formation mathématique solide et permettant de dominer les contenus à enseigner. Il est en effet indispensable, au niveau du master, que les futurs enseignants puissent disposer des outils mathématiques nécessaires pour l’enseignement actuel, primaire et secondaire. Remplir à bien cette fonction suppose que les plans de formation soient conçus en abordant, depuis les connaissances mathématiques d’étudiants de licence, les problèmes mathématiques et épistémologiques qui relèvent des contenus de savoir à enseigner aux élèves. De tels contenus disciplinaires devraient viser d’une part à consolider et réorganiser des connaissances mathématiques antérieures et, d’autre part, à approfondir et compléter des notions mathématiques dont la transposition didactique est à maîtriser pour les enseigner.

Pour devenir un professionnel de l’enseignement des mathématiques, la connaissance des mathématiques ne peut toutefois à elle seule suffire. En effet, les questions rencontrées dans l’exercice quotidien du métier sont, en grande partie, celles pour lesquelles la didactique des mathématiques fournit des outils professionnels permettant à qui les maîtrise d’élaborer des réponses. Citons-en quelques-unes. Comment analyser et évaluer des propositions d’enseignement contenues dans les manuels et les programmes ? Comment analyser a priori ce que sera l’enseignement d’un sujet mathématique une fois la préparation faite, et comment l’améliorer a posteriori ? Comment concevoir, de manière scientifiquement fondée, un enseignement des mathématiques ? Comment décrire l’activité mathématique d’une classe et l’organisation des mathématiques que l’on enseigne ? Quels sont les gestes que le professeur accomplit afin d’enseigner, et les élèves afin d’étudier ? Comment penser l’organisation didactique ? Et hors la classe, comment organiser l’étude ? Quels sont les phénomènes liés à l’enseignement des mathématiques auxquels peut être confronté ou encore que peut sciemment provoquer le professeur ? Pour pallier l’insuffisance des réponses apportées d’ordinaire à ces questions, un enseignant doit pouvoir prendre de la distance par rapport à sa propre pratique. Pour ce faire, il est nécessaire qu’il dispose d’outils didactiques permettant de rendre objectifs les faits d’enseignement afin de les observer, les analyser, les évaluer et les développer.

La rencontre avec de tels outils nécessite une formation universitaire de haut niveau qui demande à être davantage développée ; leur maîtrise un travail régulier associant observation et analyse, et évalué par l’Université. Par ailleurs, l’identification par de futurs enseignants de mathématiques des questions d’ordre professionnel auxquelles les concepts de la didactique permettent d’apporter des réponses, et d’ouvrir des pistes possibles, suppose des périodes de stage dans les classes, sous la direction de professionnels formés à cet effet, incluses dans les années de formation dès la licence. Une telle conception de la formation, associant fortement l’observation puis l’exercice des pratiques enseignantes dans des conditions s’approchant graduellement des conditions réelles du métier à la maîtrise des outils méthodologiques et théoriques qui permettent de l’analyser, s’oppose au compagnonnage. Celui-ci s’appuie sur l’idée de mimétisme et ne permet pas la prise de distance nécessaire pour penser sa propre pratique dans une approche fondée sur l’apport théorique ; il ne saurait suffire à atteindre une formation professionnelle de haut niveau.  Une telle affirmation est légitimement admise pour les ingénieurs et les médecins, par exemple ; c’est aussi le cas des enseignants. De ce point de vue, l’expérience en formation professionnelle acquise par les IUFM depuis leur création, même si elle n’est pas exempte d’erreurs, doit être préservée et développée.

L’organisation d’une formation professionnelle à l’enseignement ne saurait donc ni prendre la forme d’un émiettement des contenus à travers une multitude d’unités d’enseignement, ni celle qui verrait un supplément d’âme généraliste, relatif à l’éducation, adjoint aux actuels masters disciplinaires. Elle doit au contraire prendre la forme d’un enseignement disciplinaire, ou pluridisciplinaire selon les cas (en particulier pour les Professeurs d’Ecole, mais pas seulement) qui soit intégré ; c’est-à-dire associant les contenus de savoirs aux outils permettant d’identifier les problèmes relatifs à leur enseignement et d’agir afin de les traiter. La formation initiale doit continuer de se conclure par la rédaction et la soutenance d’un mémoire professionnel. Celui-ci remplit en effet une double fonction : pour les étudiants, apprendre par la recherche, et pour la profession, s’enrichir de la possibilité d’un corpus de travaux apportant des éléments de réponses aux questions auxquelles tout professeur est confronté.

Dans la période qui s’ouvre, afin de contribuer au développement d’une professionnalité enseignante en mathématiques, les membres de l’ARDM, partout où ils sont présents, sont invités à s’impliquer dans l’élaboration des contenus de formation des licences et masters devant conduire aux concours de recrutement des professeurs enseignant les mathématiques.

 

 

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